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La France doit-elle livrer les navires « Mistral » à la Russie ?

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C’est une question épineuse pour la diplomatie française et un sujet de débat pour toute la classe politique française. Face à une Russie accusée de faire monter les tensions en Ukraine, les forces de l’OTAN ont pris de multiples sanctions à l’encontre du pays de Vladimir Poutine. Ainsi, la France a décidé de suspendre la livraison des navires Mistral à la Russie, navires pourtant vendus en juin 2011 pour 1,2 milliard d’euros… Une livraison reportée sine die.

Le "Vladivostock"
Le « Vladivostock »

C’était le 3 septembre dernier. François Hollande décidait unilatéralement de reporter la livraison des navires Mistral à la Russie suite à l’escalade des tensions en Ukraine. Au-delà du cas de l’Ukraine, une telle annonce ne pouvait que réconforter les partenaires de la France au sein de l’OTAN et les pays en première ligne face à la Russie, comme les pays baltes.

Il y a une semaine, alors qu’aucune sortie de crise ne semblait possible, la Russie a brandi la menace d’une demande de compensations financières en cas de non-livraison, avant la fin du mois de novembre, du premier navire, le « Vladivostok ». Pour Paris, la facture pourrait alors être très lourde, des pénalités importantes pouvant s’ajouter au remboursement des paiements déjà effectués. Plus récemment, lors du G20 à Brisbane, aucune avancée significative n’a eu lieu, alors que beaucoup espéraient voir la crise se désamorcer. Aujourd’hui, difficile de dire comment sera réglé le problème, tant les divergences semblent être importantes entre la France et la Russie. Par ailleurs, la Russie, quelque peu exsangue économiquement parlant à l’heure actuelle, pourrait préférer récupérer l’argent des Mistral. Cela permettrait d’ailleurs à la ligne conservatrice de sortir en position de force, confirmant leur position anti-occidentale.

Business is business ?

Au-delà du risque économique à court-terme que pourrait représenter l’échec des négociations actuelles, la France pourrait pâtir plus longuement d’un non-respect de ce contrat (et ce d’autant que ce genre d’événements se répètent, avec l’affaire Ecomouv par exemple, ou encore la révision souhaitée par le gouvernement des contrats des concessions d’autoroutes). D’une part, les relations diplomatiques, économiques et commerciales avec la Russie pourraient être refroidies pour pas mal de temps et mettre à mal certains secteurs de l’économie française. Surtout, le secteur de l’armement pourrait y laisse des plumes et perdre de nombreux clients : en effet, comment faire confiance à la France et commander des équipements militaires coûteux avec un risque de non-livraison ? Ainsi, nombreux sont ceux en France qui appellent François Hollande à réviser sa décision afin que la France honore ses engagements, notamment à droite : un souhait partagé par environ 80% des Français, à en croire les sondages en ligne du Point, du Figaro, du Dauphiné ou encore du Parisien.

D’un autre côté, d’un point de vue éthique, il est compréhensible que la France se refuse à procéder à cette livraison et fasse pression sur une Russie impétueuse. D’autant qu’une volte-face placerait désormais la France dans une position difficile vis-à-vis de ses alliés. En effet, comment la diplomatie française pourrait-elle se faire respecter par les pays à proximité de la Russie ? Comment s’opposer à une Russie à qui l’on vend des bâtiments militaires ? Telles sont les problématiques d’un pays voulant porter haut sa voix dans les affaires internationales tout en étant un des plus gros producteurs d’armements au monde…

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